Sous une République romaine marquée par l'aristocratie, l'impérialisme et l'esclavage, un homme allait émerger pour défier le système...
En l'an 73 avant notre ère, un ancien esclave thrace du nom de Spartacus, accompagné de sa femme, une prêtresse du culte de Dionysos, est vendu comme esclave à Rome.
Vous ne trouverez pas d'images de Spartacus tel qu'il fut vraiment; ni dessins, ni peintures, ni sculptures; il n'y en a pas.
Pour quelle raison? Parce qu'il n'était pas considéré comme un héros, bien au contraire. D'ailleurs, si les historiens Tite-Live, Appien ou Plutarque l'ont évoqué, ce ne fut qu'en marge de récits concernant les batailles célèbres, en aucun cas pour en faire sa biographie. Spartacus était persona non grata à Rome.
Les représentations que nous avons de lui datent de bien après sa mort. Esclave au corps d'athlète, gladiateur prêt à mourir au combat, les fantasmes autour de la figure de Spartacus ont alimenté de nombreuses œuvres filmiques, la plus remarquable étant le péplum signé Stanley Kubrick, ou encore cette sculpture de Denis Foyatier.
A environ 25 ans, il se retrouve dans le lot d'esclaves thraces achetés par le ludus de laniste (vendeur de viandes) Batiatus à Capoue en Italie, une célèbre école de gladiateurs.
Une fois n'est pas coutume, le film de Kubrick n'invente pas lorsqu'il attribue une femme à Spartacus: c'est vrai, le couple fut vendu en même temps, et sa femme était prêtresse du culte de Dionysos. D'ailleurs on pense que la présence de cette femme dont on ignore le nom a conféré un sentiment de sacré à la révolte de Spartacus et aurait permis de fédérer les troupes autour de sa personne.
Fatigué de servir de jouer le rôle de gladiateur pour les romains, une nuit, avec 80 autres prisonniers de guerre, dont des Germains, des Gaulois et des Thraces, Spartacus orchestre une évasion audacieuse et tous parviennent à s’échapper de leurs geôles.
Une fois libres, quelle chance incroyable! Les fugitifs trouvent une charrette remplie d'armes de gladiateurs. Ils vont alors se diriger vers les pentes de la majestueuse montagne du Vésuve, qui domine alors la région de la Campanie, et qui, à cette époque, ne s’est pas encore transformée en volcan dévastateur. C'est là que Spartacus et ses compagnons trouvent un refuge temporaire, tandis que d'autres déshérités de toutes les classes sociales les rejoignent.
Spartacus - homme de guerre et fin stratège, possiblement issu de l'aristocratie en raison de ses compétences équestres - suscite la crainte des Romains. Et ils ont bien raison d'avoir peur : les esclaves insurgés mettent la Campanie à feu et à sang, écrasant plus de 3 000 légionnaires romains.
Sous la bannière de Spartacus, une armée de 100 000 hommes se forme et remporte plusieurs victoires éclatantes dans le sud de l'Italie. À chaque triomphe, Spartacus s'approprie les emblèmes de Rome, humiliant ainsi ses adversaires. Rome tremble en entendant son nom.
Alors, Spartacus était-il ce grand libérateur de l'esclavage que l'on dit ?
Non, bien au contraire: il n'a jamais remis en cause le système esclavagiste et possédait lui-même des esclaves! Il semble davantage avoir été une victime des circonstances. Même s'il est reconnu comme un chef de guerre hors paire, il subit plus qu'il ne dirige.
Ses paroles ne trouvent pas toujours écho, en particulier auprès de la faction gauloise (déjà !) qui finit par se séparer de lui et être anéantie par les armées romaines. Pourtant, la fortune lui sourit et suscite même l'admiration de ses adversaires; du moins jusqu'à ce qu'un certain Crassus, un homme politique ambitieux et richissime, lève une nouvelle armée romaine pour mettre un terme à sa rébellion. C'est alors que la chance l'abandonne.
Durant l'été de l'année -72, alors que Spartacus atteint Reghium à la pointe de la botte italienne, et qu'il envisage de passer en Sicile avec l'aide de bateaux pirates, Crassus lui tend un piège : bloquant toutes les voies terrestres, Crassus accule Spartacus dans cette région isolée du pays. Une ultime bataille a lieu, opposant les forces de Spartacus à celles de Crassus. L'objectif ultime de Spartacus est d'abattre Crassus de ses propres mains. Devant ses hommes, Spartacus égorge lui-même son cheval en disant : « Soit je gagne et je reviendrai sur le cheval de Crassus, soit je meurs ! »
Avec cette détermination sans faille, Spartacus force le passage à travers les rangs ennemis, tuant au passage deux centurions romains. Alors qu'il se rapproche de son adversaire, il est atteint par deux flèches et s'effondre à terre. Il sera achevé par des soldats romains.
Ainsi, le général Spartacus est mort au combat, entouré de ses hommes. Pour Rome, Spartacus n'a jamais été autre chose qu'un brigand.
Sa révolte, bien qu'ayant échoué, a néanmoins eu des répercussions sur le statut de la gladiature à Rome. Auparavant réservée aux esclaves, la gladiature engage désormais des hommes libres sous contrat, et dorénavant ces derniers gagnent 25% des sommes perçues lors des spectacles.
La révolte de Spartacus ne fut pas la seule occasion où le puissant empire romain s'avéra être un colosse aux pieds d'argiles. Mais ça, c'est encore une autre histoire...
Bibliographie:
Spartacus, Eric Teyssier, ed. Tempus, 2017.
73 avant J-C, Spartacus et la révolte des gladiateurs, Catherine Salles, Ed. Complexe, 2005.